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  • : PARLHOT
  • : Parlhot cherche à remettre l'art de l'interview au cœur de la critique rock. Parce que chroniquer des CD derrière son ordi, c'est cool, je le fais aussi, mais le faire en face du groupe en se permettant de parler d'autres choses, souvent c'est mieux, non ?
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24 mars 2006 5 24 /03 /mars /2006 01:55
Casseurs de presse

9 février. 15h. Ça ne répond pas à la rédaction du Plan B, qui rassemble les plumitifs militants de Fakir et PLPL. On appelle de la part de Technikart à qui on a prévu de vendre l'article et comme ce mag est en super mauvais terme avec PLPL, on tente le coup de fil chez Fakir en espérant tomber sur l’auteur du pamphlet Les petits soldats du journalisme. "Allo. François Ruffin ?"


"Je fais un journal, ce n'est pas pour qu'on parle de moi"


Allo. François Ruffin ?
C’est lui-même.

Je suis pigiste, j’aurais aimé qu’on parle du Plan B. C’est possible ?

Bah oui mais enfin, comme vous me dites que vous êtes pigiste, je vais vous dire déjà une chose d’entrée c’est que toutes les contributions, enfin aucune contribution ne sera rémunérée.

Je sais. Je ne veux pas vous proposer d’articles. Mais proposer un article sur vous, Le Plan B.

Ah, bof (rire jaune)

Ça ne vous intéresse pas ?

Pas trop, non.

Pourquoi ?

Bah je ne sais pas, moi je fais un journal, ce n’est pas pour qu’on parle de moi, quoi.

Il faut bien que les gens sachent que vous existez. Moi, j’ai appris la sortie du Plan B en fouillant les linéaires de mon kiosquier. Je suis tombé par hasard sur le hors-série de PLPL consacré au manifeste du futur journal.

Vous envisageriez de faire publier cet article dans quel magazine ?

J’en ai parlé au bimestriel Médias (ouhhh ! en se débine, on ment).

Ouais, je crois que ça ne va pas le faire, tu sais. Franchement.

Pourquoi ?

Bah parce que euh on a une position assez radicale.

Ouais, j’ai vu…

Ecoute, ce n’est pas du tout vis-à-vis de toi, c’est… je ne crois pas du tout que Médias publiera sur nous quelque chose de… je suis très sceptique, quoi.

Dans quels médias accepteriez-vous de communiquer ?

Bah euh je ne sais pas moi. Je sais que comme je bosse sur France Inter chez Mermet Daniel Mermet, je vais faire un passage par chez Mermet, quoi. Enfin, peut-être pas moi personnellement d’ailleurs, mais une personne du Plan B, éventuellement, si Daniel Mermet ça lui dit, et puis je crois qu’on en restera là, quoi (rire jaune).

Ça ne vous intéresse de passer par d’autres médias pour éventuellement toucher d’autres personnes qui aimeraient savoir qu’est-ce que Le Plan B et de quoi ça parle ?

Bah, éventuellement des médias militants, puisque c’est quand même un journal qui est un peu militant, euh ou militant du journalisme. Mais pour avoir lu Médias euh… c’est mou, quoi. C’est le moins qu’on puisse dire.

Mais les gens qui lisent des médias qui ne sont pas estampillés "militants" peuvent aussi être intéressés par une autre approche de l’info…

Ouais, ouais, sans doute, mais je te dis, j’ai déjà personnellement un certain nombre d’expériences euh qui ont pu très bien se passer mais euh de toute façon ce n’est pas moi qui prendrait la responsabilité de parler au nom du Plan B aujourd’hui parce que je n’ai pas fait tellement de contribution pour le premier numéro. Je te le dis honnêtement, quoi.

D’accord. Mais Le Plan B, c’est quand même l’association de Fakir et PLPL.

Oui, mais là je sors un bouquin en fait, début mars (Quartier Nord, éditions Fayard).

Sur le journalisme ?

Euh pas vraiment, non. En partie, mais pas vraiment.

Tu peux me dire de quoi ça parle ?

Oui, oui, bien sûr. En fait, c’est un bouquin sur un quartier difficile, notamment. Et sur la manière dont vivent un certain nombre de personnes à l’intérieur de ce quartier.

Un quartier d’où ?

C’est à Amiens, dans la ville, dans la Somme.

C’est donc un livre sous forme de reportage.

Exactement. C’est un récit qui commence par un accident du travail, en enquêtant sur cet accident du travail et en déroulant la pelote, je rencontre un certain nombre d’interlocuteurs qui en matière d’emploi, de logement, euh… de religion aussi, enfin de came, de tout ça, m’apportent des éclairages.

A la base ça devait être un article ?

Ouais, enfin c’est un article de 500 pages (rire moins jaune).


On peut reparler du Plan B deux secondes tout de même ?

Oui, oui.

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24 mars 2006 5 24 /03 /mars /2006 01:38
Casseurs de presse

Je n’ai pas encore fini de le lire que voilà, ô miracle du net et de mon professionnalisme hors pair, vous en êtes déjà informé : Le Plan B est sorti. Ça y est, ce 10 mars, après trois mois d’attente, après avoir été initialement prévu pour janvier (histoire de nous plomber le moral après les fêtes de fin d’année ?), ce bimestriel "critique des médias et d’enquêtes sociales" est là, tout chaud tiré des presses, son encre prête à salir mes doigts et remuer mes méninges.



Le Plan B
, c’est la fusion à l’échelle nationale de deux journaux alternatifs, satiriques et essentiellement régionaux : PLPL, journal de Marseille "qui mord et fuit", et Fakir, journal d'Amiens "fâché avec tout le monde ou presque" qui existent respectivement depuis cinq et sept ans. Le Plan B, c'est un journal de "combat" et je découvre enfin son sommaire jalousement gardé comme la huitième merveille du monde. (J’ai harcelé en vain par mail toute la sphère alter-médiatique pour en savoir plus sur ce fameux sommaire avant parution.) Au menu de ce numéro 1 : un rappel du manifeste présenté en grande pompe deux mois avant dans un hors série gratuit mais en kiosque de PLPL ; un dossier sur "la question sociale ensevelie sous les faux débats" titrant "Les ouvriers français sont des Arabes comme les autres" ; un article déonçant les journalistes qui au lieu de "dépeindre avec réalisme la vie des gens du peuple (…) ont préféré transformer le "populisme" en injure" ; une cartographie des "problèmes de concentration dans le domaine des médias", qu’ils étiquettent "Parti de la presse et de l’argent" ; une incitation au boycott de Libération "qui ment et licencie" ; la TNT gangrenée par les velléités d’Alain Minc ; "La critique des médias récupérée par les tartuffes" ; Daniel Cohen qui "explique la mondialisation aux enfants" ; les émeutes des banlieues ; le procès de Jacques Séguéla, les journalistes qui se repaissent, et jouissent, de commenter les "friandises savoureuses" que leur livre des "dérégulations libérales", qui se comptent en "avions aplatis", en "pétroliers éventrés"


Le Plan B met la plume dans la plaie
Vous l’aurez compris : Le Plan B met la plume dans la plaie. Tout y est volontiers railleur, acerbe, "sardonique", comme ils disent. C'est bien se dit-on, c'est tellement rare dans la presse actuellement en "vente libre" (goûtez moi cet oxymoron camarades !) cette liberté de ton, ce plaisir d'égratigner jusqu'au sang. Mais d'un autre côté, on hésite. C’est un peu trop saignant se dit-on, trop haineux, sans une once d'optimiste, étouffant, manichéen. Il faut voir comment ça respire la joie de vivre, comment ça fait envie ! La mise en page donne difficilement envie d'aller plus loin que le survol de politesse. Le Plan B est de toute évidence mal dans son époque, ce qu'on comprend fort, mais ce qu'on comprend moins c'est son rapport semble-t-il frustré au journalisme et au pouvoir que son statut implique.

Bref, j’ai payé de ma menue monnaie, 2 € en kiosque, et de ma personne, qui n'est pas des leurs, pour vous en apprendre plus sur ce nouveau journal indépendant qu'un simple inventaire à la Prévert de leurs thèmes de prédilections. J'ai interviewé un des "directeurs" du Plan B (il n'y a pas de patron dans cet avion), le plus "people" d'entre eux : François Ruffin, auteur des Petits soldats du journalisme (CFJ), pamphlet sur ses années au Centre de Formation des Journalistes. Joint par téléphone, il n'a pas souhaité que je publie notre conversation. Qu’il me pardonne. Les gens, j’estime, ont le droit de savoir. Et moi celui de rapporter ce qu'on me dit une fois que je me suis présenté en tant que journaliste.


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20 mars 2006 1 20 /03 /mars /2006 02:38

Motion capture total


Cinq jours que je suis à Cannes. Hier, Renaissance m’a reconnecté à Paris, mais pas n’importe quel Paris…


On a de quoi s’occuper dans l’appart. Mais bizarreement, on trouve toujours de quoi s’ennuyer. Alors quand on se sent comme enterré vivant dans ce bunker résidentiel et qu’il s’en faudrait de peu pour que des fantômes en profitent pour zoner ici comme le Terby de Lunar Park, on sort. Ça a l’air simple de sortir. Ça ne l’est pas quand le dernier épisode de Friends passe sur AB1. C’était dur d’éteindre la télé et de fermer la porte derrière nous. Surtout qu’aucune rediff du dit épisode n’était prévue (on a vérifié). Mais on est quand même sorti pour voir Renaissance au ciné.


Crème contre l’humanité

On a bien fait. C’est pas mal du tout Renaissance. Renaissance ? Oui, c’est le film d’animation française du moment. Vous ne pouvez pas ne pas en avoir entendu parler. A moins de vivre dans un bunker sans télé. La promo du film a été bétonnée. Avec sa typologie évoquant celle de PlayStation, le titre du film annonce d’emblée la couleur : "Bienvenue dans le troisième monde". Le troisième monde en question, c’est Paris. Pas le Paris actuellement en proie aux manifestations anti-CPE, mais un Paris fantasmé 48 ans plus tard. Et en 2054, Paris ce n’est plus VRAIMENT Paris. C’est une mégalopole high-tech et labyrinthique. Un impressionnant corset de ferraille. Sur les bases de l’ancienne capitale de 2006 se sont greffées de nouvelles fondations qui permettent aux riches d’habiter en hauteur, tandis que les plus pauvres habitent en dessous à la merci de la surpopulation et de tout le reste. Le film ne s’attarde pas sur cette dimension sociale. Mais il s’arrête dès les première secondes sur un écran publicitaire qui trône au dessus de tout ça : "Santé, Beauté, Longévité". Avalon vous accompagne tout au long de votre vie", nous promet une femme au débit hypnotique dont la peau rajeunit à vu d’œil. Avalon, c’est une multinationale qui oeuvre dans le secteur des produits cosmétiques. Elle convoite une jeune chercheuse qui vient de mettre au point le protocole de l’immortalité au nom de code Renaissance (oups ! je viens de vous faire économiser 9 € en cinéma en vous en disant trop...). Un flic taciturne et couillu part à la recherche de la jeune femme pour éviter au monde ce funeste destin.

Ville lumière
Le scénario tient la route, mais ce n’est pas le point fort du film. Le point fort c’est bien évidemment les images. Les mecs ont bossé dur (8 ans de travail et 14 millions d'euros de budget) et c’est la classe internationale. C’est ultra réaliste et ultra stylisé à la fois. Splendeur du noir et blanc et de l’animation en 3D et Motion Capture. Splendeur "cathédrale" des images sculptées comme des pierre par les contrastes. Tout est magnifié, dessiné au scalpel par les jeux d’ombre d'une lumière qui règne en maître. Tout est volume à l'encre de Chine, architecture bichromique propice à l’affrontement du Bien et du Mal. Cette histoire de machination qui menace le sort de l’humanité est plutôt convenue, mais on est surpris qu’elle prenne place dans Paris. Qu’elle s’incarne dans Paris. Ça, c’est limite une révolution tellement on est habitué à ce que ce genre d’histoires fassent le sel des blockbusters US. On est tellement habitué à leurs stéréotypes, leurs codes et leurs univers qu’on prend ici un malin plaisir à voir notre capitale et ses lieux communs (la Tour Eiffel, le Métropolitain, les Galerie Lafayette, la Fnac – merci le placement produit) être le lieu d’un tel scénario catastrophe. Pour une fois, si je puis dire, ce sont des français qui tiennent le beau rôle de sauveur du monde. Et c’en est presque exotique à voir.

Botox Planétaire
Sans Paris, Renaissance ne serait pas ce qu’il est. Il lui manquerait un personnage. Gothamisé, Blade Runnerisé, mangaïsé, Paris est en effet le personnage central du film. Un personnage-décor que les personnages-protagonistes arpentent en tout sens, ce qui nous vaut des angles de vues originaux et percutants. Dans ce Paris ville du crime, l’apocalypse snow presque en permanence comme pour surligner les ténèbres et adoucir la violence des hommes. Cette neige qui tombe semble citer ces vers de Victor Hugo, dans Les Contemplations : "Nous sommes les flocons de la neige éternelle dans l'éternelle obscurité". Le héros et l’héroïne sont beaux, héroïques et amoureux comme chez Enki Bilal. Si ce n’est qu’on nous épargne son romantisme pro-Baudelairien et son mysticisme fourre-tout. La beauté des images efface presque les quelques failles du scénario, comme elles le font fait de sa convenance. Renaissance ne laisse pas de traces impérissables, mais on passe un bon moment. A sa sortie, on tombe nez à nez avec Sharon Stone qui présente sa nouvelle beauté de quinquagénaire botoxée sur une affiche Dior : "Plus belle aujourd’hui qu’à 20 ans. Avec Capture Totale". L’ironie est mordante.


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19 mars 2006 7 19 /03 /mars /2006 03:44

Carte postale de Californie


Trois jours que j'ai quitté Paris pour lézarder à Cannes. Jamais sans mon ordi...

Hier, c’était mon anniversaire, j’ai eu 26 ans. Et qui dit anniversaire dit de toute évidence cadeaux. Ce qu’on m’a offert ? Commençons plutôt parce que j’aurais aimé avoir ! Pas l’amour, la santé et le travail, bien sûr que je veux tout ça. Non, les cadeaux que je souhaitais précisément avoir pour mes 26 ans, il y en avaient de bien concrets et bien bêtas auxquels j’ai pensé vite fait la veille, comme un jeu, pour voir la petite liste que ça je pourrais bien obtenir et ça a donné ceci : 1) Le dernier single de Nadiya, « Tous ces mots », qui pulse à mort avec son instru hard rock. Mais ça, c’est pour déconner, alors plus sérieusement en 2) j’aimerais avoir le DVD de Phantom of the Paradise car on m’a déjà vanté les mérites de ce mythique opéra rock des années 70 et j’avoue que l’extrait que j’ai entraperçu hier à la télé m’a particulièrement alléché par son univers bizarroïde. En 3) comme j’adore lire, notamment des essais cramés du ciboulot, j’aimerais qu’on m’offre les quelques pages du livre eXistenZ où Medhi Belaj Kacem "pop philosophe" sur les nœuds métaphysiques du film de Cronenberg. Cronenberg et Belaj Kacem : des passeurs précieux. J’aime les obsessions deleuziennes, mais je serais sûrement incapable de les lire et comprendre en langue de Deleuze. Bref, en 4) Entre les murs de François Bégaudeau ferait bonne figure au panthéon des cadeaux de ce vingt-sixième anniversaire. Parce que ce jeune prof de français fan de rock (il est fondu de Green Day), de littérature et de cinéma (il écrit aux Cahiers) parle dans ce livre de l’école et des gamins d’aujourd’hui de la seule manière pertinente qui soit : de l’intérieur. En 5) pour finir, je ne serai pas original en souhaitant déchirer un paquet cadeau qui débouche sur La possibilité d’une île de Michel Houellebecq. J’ai toujours aimé ses poèmes et ses préoccupations sur le devenir du genre humain. Or son dernier roman a l’air de mixer à merveille ces deux paramètres que sont la poésie (par la construction narrative du livre) et l'humanité S.F (par le thème des clones). Ma copine a-t-elle eu ces cinq idées cadeaux en tête ? Non, mais elle a tout de même fait mouche en m’offrant : 1) une tondeuse électrique pour soigner mon pelage d’über sexuel ; 2) un sac à bandoulière pour être plus mode et "héroïquement" galbé justaucorps quand je fendrai la foule des villes ; 3) l’enregistrement en version longue du NBA Slam Dunk Contest du All Star Game de 2006 pour réveiller les ardeurs de "Jordan blanc" que je n'exprime plus depuis 10 ans ; 4) Va où ta queue te mène, un livre récent dont la couverture et le titre (voir ci-dessus), très Magritto-Freudien, m’avaient fort intrigués il y a peu sur les étalages d'un libraire ; 5) ne rien faire de plus délicieux ce soir-là que de rester à la maison et dîner en regardant Taratata. Bashung y reprenait du Dick Annegarn, le morceau "Bruxelles"qui dans sa gorge et caressé par une mélancolique mélodie de piano ressemblait à s’y méprendre au morceau "Angora", point final de son album Fantaisie Militaire, pour moi un de ces sommets. Ce "Bruxelles" me filait la chair de poule en charriant en douce le corps fantôme d' "Angora". Voilà, c’est peut-être ça l’amour. Un peu comme ces cinq cadeaux. Ce n’est pas ce qu’on attendait, ce qu’on s’était formulé, c’est un peu en DEHORS, à côté, mais ça se pose là comme une évidence et vous ravit tout entier.

I love you but I've not chosen darkness
A propos d’amour, je ne résiste pas à l’envie de vous citer un passage de Va où ta queue te mène. L’emballage du livre tient d’ailleurs toutes ses promesses : on ne débande pas une fois le qu’on l’a ouvert. Et j’aimerais vous en parler dès maintenant car qui sait, je n’en aurais peut-être plus le courage plus tard. Page 21 : "L’amour, voilà lâché le mot magique car c’est bien d’amour qu’il s’agit. Il n’existe pas de connaissance intellectuelle de l’amour, pas de définition, pas de description, pas d’apprentissage, pas de guide, pas de cours de formation ni de cours de rattrapage. Comme un direct au cœur, on sait qu’il est là, le temps où il est là. Je ne parle ici ni de dépravation ni de perversion, le sexe sans amour, c’est, au mieux, de la gymnastique ou de l’hygiène. L’amour sans le sexe, ça n’existe pas, même s’il est de bon ton de prétendre le contraire. C’est là où il y a l’amour que sa queue mène un homme et quand il n’y a plus d’amour, il remballe son matériel et se tire sans se retourner ! Aucun plaisir n’est aussi grand que l’amour de l’aimée, aucune douleur n’est aussi intense que l’absence de l’aimée ; aucun ennui n’est aussi profond que la présence de celle que l’on a aimée et que l’on aime plus. Plaisir, douleur, ennui constituent les trois émotions de base associées à l’amour – qui est en soi une émotion – donc au sexe – qui, lui, est à la fois un organe et une émotion. Toute attitude favorable à la trinité émotionnelle amour-sexe-plaisir est à cultiver précieusement. Tout ce qui touchera au trio maléfique sexe-douleur-ennui ou au quatuor infernal amour-sexe-douleur-ennui, sera à fuir comme la peste."  Qu’en pensez-vous ? Bien dit, non ?

L’Equipée Sauvage
A tous ces cadeaux s’ajoutent les quelques grammes de culture qu’on a pris soin d’emporter avec nous jusque dans ce paradis cannois. Et oui, on ne se désintoxique pas comme ça. Il y a : 1) le dernier Bret Easton Ellis, Lunar park, que ma copine trépigne de lire tandis que je me régale de Va où ta queue te mène ; 2) la BD Celebritiz de Trondheim qui raconte l’histoire d’un mec qui achète une veste dans la poche de laquelle se trouve des pilules qui rendent célèbre ; 3) le DVD du Nosferatu de Murnau ; 4) celui de La vie est belle de Capra ; 5) l’album Qwartz du groupe cannois Mandrac qui joue un noir et charismatique post-jazz-électro-rock. Mais ce n'est pas tout. Nous avons aussi sous le coude : 6) quelques magazines ; 7) Gainsbourg Confidentiel (cette façon si "moléculaire" et picturale qu'il a de décomposer et réinventer le prénom de cette Laetitia en "Elaeudanla téïtéïa" entre, je trouve, en étrange correspondance avec cette manière qu'à Hockney de matérialiser sur sa toile "Sunbather" l'illusion de la lumière jetant ses reflets dans l'eau comme des choses existantes, vivantes) et 8) le dernier Black Rebel Motorcycle Club qu’on a achetés à la Fnac pour une poignée d’euros. Très bien d’ailleurs ce troisième album des BRMC. Ces trois types vont droit où leurs queues les mènent et ils y vont plein pot. Cette fois, délaissant le gros son noir, tortueux et urbain de leurs débuts, ils ont eu le culot d'arrêter la course à l'armement revival rock et de virer country et ça donne Howl, un bien bel album. En l'écoutant, j’ai repensé bizarrement à The back of Hollywood, la toile d’Eward Ruscha (voir tout en haut). Parce que la country, c’est la musique des petites gens, la musique de l’homme nu, avec sa bite, sa plaie et son couteau, c'est la musique du réel, des grands espaces abruptes, de l’histoire quotidienne, du temps qui passe. En somme, une musique à hauteur d’homme. Or Hollywood c’est tout l’inverse. C’est une usine à rêves qui cherche à construire du mythe pour rénover l’histoire et la mémoire réelle des hommes. Une usine qui tente, par ce mythe de masse, de faire décrocher les hommes d’où ils sont et de ce qu'ils sont VRAIMENT. Dans cette peinture, dit la brève du journal Aéroports de Paris, l’artiste "se confronte avec ironie aux grands mythes américains". Il montre "l'envers du rêve hollywoodien" : "la relation primitive à la nature, le caractère héroïque, la magie du cinéma et le star système" qui "perdent leurs atours dans ce mirifique décor en carton-pâte". The back of Hollywood est en cela un simulacre de peinture primitive. Sa définitive impossibilité. Carton plein.


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18 mars 2006 6 18 /03 /mars /2006 02:26
Carte postale de La Californie

Trois jours que j'ai quitté Paris pour lézarder à Cannes. Jamais sans mon ordi...
 
Ici c’est le paradis. Je ne sais pas si je pourrais être cannois 365 jours sur 365 jusqu’à la fin de mes jours (je suis pour l’instant, je crois, bien trop parisien et intoxiqué dans l’âme pour décrocher), mais pour 5 jours, je ne dis pas, c’est nickel. Mais même au paradis, le travail me rattrape puisque, voyez-vous, hypothétiques lecteurs, je vous parle. Ça n’enchante pas ma copine. Elle n’aime pas que je bosse les vacances et jours fériés. Elle ne comprend pas VRAIMENT que ce n’est pas VRAIMENT du travail pour moi, que c’est un plaisir, que J’aime VRAIMENT ça. Mais elle s’y fait, avec le temps. Surtout depuis qu’elle a elle-même un blog. D’ailleurs elle devrait s’y mettre car ça fait quelques jours qu’il crie famine son blog. Mais je vais arrêter de vous parler de ma copine. Car ce n’est pas de ça dont je voulais vous parler. Ce dont je voulais vous parler, tout d’abord, c’est de moi. Oui, MOI. Parce que je me rends bien compte que depuis les deux semaines que PARL HOT existe, je ne vous ai pas lâché un traître mot sur moi. Bien sûr, mes articles sont écrits PERSONNELLEMENT et ils parlent donc de moi, mais je voulais vous parler de moi plus directement. Officialiser les présentations. Ce sont des choses qui se font. Et je sens bien que c’est important, NECESSAIRE même pour que vous et moi puissions aller plus loin ensemble. C’est que je tiens à ce que vous fassiez péter mes statistiques, chers lecteurs, que vous ne restiez pas hypothétiques et moi seul avec mon blog et mes points de vues qui me tiennent à cœur.
 
Ground control to Major Tom ?
Vous ai-je dit que j’étais pigiste ? Pour commencer c’eut été pas mal. Je suis journaliste indépendant, spécialisé en musique (s’il faut déclarer une spécialité, parce que perso je ne suis toujours pas sûr de bien porter la casquette, c’est juste que j’aime ça la musique, que c’est le truc que je maîtrise ou détourne le mieux, et qu'elle permet de digresser sur d’autres thèmes). Mais un pigiste galérien. Car je rame à trouver les pieds-à-terre journalistiques qui me permettraient de vraiment vivre ma passion. Et de ma passion.
 
Quitter la pub ? 
Enfant, je n’ai pas rêvé d’être Tintin reporter. Le journalisme ne me faisait pas rêver. Pour tout dire, je n’y pensais même pas au journalisme. Ça ne faisait pas partie de mon monde. Je suis de ceux qui se sont tournés vers le journalisme pour fuir le monde de la com. De ceux qui ont mis un pied dans la pub en pensant qu’ils pourraient y faire valoir leur plume et leur pulsion d’écriture. De ceux qui ont pensé un temps, très court – un laps de temps –, faire leur trou dans la création publicitaire, espérant y trouver leur compte, une sorte de bulle, d’épanouissement personnel, en jouant les concepteurs-rédacteurs. De ceux qui se sont fourrés le doigt dans l’œil, qui n’avaient de toute évidence pas la fibre et l’abnégation idéologique requises. De ceux qui regardaient à 20 ans les anti-pubs gagner du crédit et le concepteur-rédacteur Frédéric Beigbeder se stariser en soldant l’attrait de l’affaire avec son livre 99F. Sans parler du u No Logo de Naomi Klein.
 
Quitter le rock et la culture pop ?
Je suis de ceux qui sont venus au rock sur le tard, à 17 ans, avec Radiohead, de ceux qui ont lu avec passion Rock&Folk, Les Inrocks, Technikart, et qui continuent d’ailleurs, qui y ont même cherché leurs entrées pour écrire et ne plus être spectateur, mais qui en sont un peu revenus, qui ne savent plus trop s’ils sont férus tant que ça de rock et de pop culture. (Parce que vous savez trop de truc tue le truc et je n’ai jamais eu l’esprit de chapelle, je ne me suis jamais senti l’envie d’être d’une bande, j’ai donc toujours fait sans.) Je suis de ceux qui ne trouvent pas de nouveaux plissements de terrain propice à l’émergence d’une nouvelle contre-culture, et qui se demandent d’ailleurs s’ils en souhaitent une d’énième contre-culture, parce qu’ils sont un peu saoulés par le clivage rebelle de ces soulèvements générationnels, parce qu’ils pensent qu’ils ne sont trop souvent qu’une volonté égocentrique de prendre le pouvoir et un spectacle, récupérable.
 
Rémi sans famille ?
Je suis de ceux qui se sont d’ailleurs longtemps demandé si c’était une bonne chose de créer son blog, si c’était utile de faire comme tout le monde, d’ajouter une milliardième voix sur le Web, si ce n’était pas se tendre un piège et s’enfermer que de croire à cette échappatoire qui implique de rester pas mal d’heures sur son ordinateur en plus du temps énorme qu’on y consacre déjà. (Je n’ai pas de réponse à cette question.) Mais je suis de ceux qui aiment toujours écrire JOURNALISTIQUEMENT et avec STYLE si possible. De ceux qui aiment croire qu’il y a des gens exigeants et curieux au bout du fil et qu’ils ne manqueront pas de faire bon usage de ce blog, d’y élever à leur tour leurs voix s’ils y trouvent matière à réaction. Je suis de ceux qui espèrent encore mais pour combien de temps encore ? Voilà où j’en suis. C’était l’instant Rémi sans famille. Du pur premier degré cher lecteur, bien long et tout, parce que parfois il faut, pour s’envoyer en l’air dans une compréhension mutuelle. Je rends l'antenne, jusqu'à demain.
 
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18 mars 2006 6 18 /03 /mars /2006 01:27
Le festin N(e)u !

Quatre jours que j’ai quitté Paris pour lézarder à Cannes. Aujourd'hui : pause rock, avec
Mandrac. Pour le Printemps des poètes, ce trio local friand d'ambiant, de krautrock et de drum'n'bass jouait à Grasse dans le cadre d'une soirée électro. En novembre 2004, je les interviewais.



Ce trio cannois avait déjà la marmite bien pleine. En 2001, son "rock au sens large" nourri de "Pink Floyd, King Crimson, Vangelis et Krafwerk" se mêlait à d’autres "trucs bien barrés", comme le jazz, l’indus, le dub et le trip hop. Mais en 2004, goinfre d’expérience, il a phagocyté en un nouvel ingrédient de taille : l’électro, qui est venu parfaire son grand mix. Après deux démos "plus orientées hardcore avec des voix rap ou gueulées", Qwartz, leur premier, laisse donc apprécier des compositions plus riches en nuances, mais non moins explosives. Ces 8 titres, majoritairement instrumentaux, développent des atmosphères teigneuses et paranoïdes ayant, toutes proportions gardées, de fortes accointances avec les univers parallèles de "Philip. K.Dick, Maurice Dantec, William Burroughs et Mad Max". Le Radiohead d’Amnesiac n’est pas loin dans ce magma bouillonnant de lourdes lignes de basses et de nappes de synthé… Etrange cuisine… On a soulevé le couvercle... Didier Chanot (bass/vocals), Cyril Decaudain (machine works), Laurent Tamagno (drums) nous détaillent par le menu leur Festin N(e)u !


Comment le groupe s’est-il formé ?

On s’est rencontré avant de faire de la musique. On a commencé à jouer il y a une douzaine d’année, dans différentes formations, comme Alien Nation, Substance, Yellowprawn, Hector’s Circus, parfois ensemble, parfois avec d’autres musiciens. Finalement, on a formé Mandrac en 2001. On vient à peu près tous les 3 du même horizon, le rock, au sens large, de ces 50 dernières années, le hardcore, le metal, le début de la techno et des musiques électroniques en général, le hip hop… Puis, au fil du temps, le jazz, l’indus, le dub, le trip hop, et tous les trucs bien barrés…Le champ est vaste, mais on se rejoint sur les sensations à faire passer dans une chanson.

En écoutant Qwartz, on ne peut s’empêcher d’y voir la bande son d’un monde futuriste comme celui de Blade Runner ou de La Guerre des Mondes…
Les atmosphères futuristes dont tu parles font effectivement partie de grand nombre d’influences que nous avons en communs, même si chacun d’entre nous possède son expérience propre. Mais dans un style similaire on pourrait aussi citer Philipe K.Dick, Maurice Dantec ou William Burroughs, un film comme Mad Max…

Vos morceaux développent des ambiances mystérieuses dures à cibler. Comment définissez-vous votre musique ?
Notre musique ne nous semble pas expérimentale, ce n’est pas une étude de 45 minutes sur le larsen. Elle est simplement le résultat d’influences diverses et variées, ce qui donne ce côté "peu entendu" qui nous est propre. Elle est intrigante bien sûr, mais pas plus étrange que ce qui se passe dans le cerveau de n’importe qui. Elle est la somme des états d’esprit par lesquels nous sommes passés lors de la composition des morceaux. A ce titre, on peut la qualifier de fusion au sens propre du terme. Chacun doit définir ce qu’il entend à sa manière, avec ses propres repères. Dernièrement on nous a proposé "Trio organique électro progressif", ce qui colle pas mal.

Certains morceaux font, je trouve, penser aux dernières "expérimentations" de Radiohead. "Mekanism", par exemple, n’est pas si éloigné du climat de "The National Anthem" et "N…N" de celui de "Like Spinning Plates"…
On connaît Radiohead, mais ce n’est pas une réelle influence sur notre musique. On n’invente rien, ça va forcément faire penser l’auditeur à un groupe qu’il connaît. Pour toi, ça a été Radiohead, pour d’autres ça sera la Compagnie Créole ou Judas Priest.

L’album s’ouvre sur des climats assez furieux et convulsifs, jouant sur un sentiment d’oppression rock indus, un peu comme chez Nine Inch Nails. Mais il se clôt sur des climats apaisés, sereins, presque féeriques, comme chez Sigur Ros. Travaillez-vous vos albums comme un film qui a sa propre dramaturgie ? Si oui, quelle histoire raconte Qwartz ?
On travaille les chansons, le disque et le live comme de grandes entités a part entière, le but étant de faire voyager l’auditeur, de le faire passer par un certain nombre d’émotions qu’il a en lui. On pourrait dire que Qwartz est un film sur la journée d’un individu quelconque, avec ses différentes humeurs, ses joies, ses peines, ses angoisses et ses pétages de plomb…

En ce moment, bon nombre de jeunes groupes français sortent du schéma pop couplet-refrain en créant des atmosphères complexes à base de synthé. Je pense à M83, Sébastien Schuller, Syd Matters, Encre, Téléfax, Vérone…
Ces groupes ne nous parlent pas vraiment, hormis M83 que l’on a connu avec leur premier album. Mais en effet cette musique sort des sentiers battus. Les morceaux sont plus construits comme un mix de DJ, avec des montées progressives et inexorables. On dirait plus une sorte de transe que des chansons pop, même si cela garde un coté alternatif, comme l’arrivée successive de vagues…

Pourquoi, selon vous, ce style de musique très "transe" et instrumental vient-il fortement pervertir le moule de la pop depuis le début des années 2000 ?
C’est probablement dû à l’arrivée à "maturité musicale" de personnes ayant baigné dans cette atmosphère depuis leur plus tendre enfance. L’électronique a dû réellement arriver en musique dans les années 70, toutes les personnes nées depuis n’ont pas pu éviter son influence, ils savent s’en servir. Les gens nés avant n’ont pu que s’adapter.

Ecoutez-vous ce type de musique planante et psychédélique dont on vous sent proche : Pink Floyd, King Crimson, Kraftwerk, Tangerine Dream, Neu et Can ?
On a mangé du Pink Floyd, jusqu’à leur dérive dans les années 80. Un peu de King Crimson, du Vangelis, Blade Runner oblige, du Kraftwerk aussi. En revanche, pas de kraut rock (rock allemand dit "rock choucroute", nda), ou très peu. Peut-être est-ce une influence indirecte, par le biais d’un groupe dont on serait fan et dont les membres seraient fan de kraut.

On parle choucroute. Imaginez : Mandrac est une marmite. Qui met quoi dedans ?
On n’a pas de schéma rigide de composition, même si on a quelques habitudes. Les chansons viennent parfois d’une jam à trois de 45 minutes minimum, et qu’on enregistre sur cassette. On réécoute et on récupère des plans, des harmonies, des lignes de chant, des ambiances... D’autres fois cela vient de compositions que l’on fait chez nous, avec nos ordinateurs, nos sampleurs, nos synthés. Ces compos sont ensuite réarrangées à trois. Quand elle fonctionne, la technologie nous facilite la tâche, on possède tous de quoi faire du son chez nous, de quoi récupérer des boucles, des pistes entières ou des samples chez les autres, et ainsi de proposer, d’arranger…Bref, de toujours composer.


De quand date les compositions de Qwartz ? Ont-elles été joué live ?
Les compositions présentes sur Qwartz datent en gros de 2003 et 2004. Elles n’ont pas toutes été jouées live, mais le seront lorsque sortira l’article. On va faire une petite série de concerts afin de roder un peu notre nouveau set.

Comment évoluez-vous depuis vos débuts ? Vers quoi voulez-vous tendre ?
Avant ce CD, on a sorti deux démos. La musique était plus ou moins dans la même veine. Early Materials (2001) était plus hardcore, avec des voix rap ou gueulés. Dans Mandrac (2002), l’électronique a trouvé sa place, la musique s’oriente plus vers la drum’n’bass. Actuellement on accorde plus d’importance à l’harmonie, à l’ambiance de chaque morceau et aux chants, sans pour autant délaisser le coté énergique des premières compos. En définitive, les atmosphères sont plus variées et plus poussées. Pour l’avenir, on n’a pas prévu notre évolution musicale, pas de plan précis, si ce n’est de continuer à composer, va savoir où cela va nous mener.

J’ai appris que vous faisiez parfois des musiques de pub et de films. Avez-vous de tels projets actuellement ?
On a quelques plans pour des courts-métrages ou des compositions sur le thème d’un film, mais comme rien n’est fait, n’en disons pas plus…En revanche, on travaille l’inverse en ce moment, c’est-à-dire l’habillage visuel sous forme de projections pour le live.

Mandrac reste donc votre projet musical prioritaire ?
Nous collaborons tous les trois dans d’autres projets, mais Mandrac reste notre seule véritable priorité. Nous n’allons pas en rester là. On va faire encore plus de scène, là où notre énergie est la plus palpable. Mais aussi plus de compositions, pour creuser notre univers. On a certainement pas tout donné sur un CD.

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17 mars 2006 5 17 /03 /mars /2006 03:31
Carte postale de La Californie

J'avoue. La vie de pigiste a du bon. Quand on en a marre de trimer comme un dingue pour pas un rond car les journaux qu’on prospecte ne veulent pas de nous, on se barre, tout simplement. On prend nos clic nos clac, notre petite copine et on part au soleil. Pour cela, me diriez-vous, encore faudrait-il avoir un pied-à-terre dans le sud – je ne vais pas louer, je n’ai pas les moyens –, une petite copine et que la dite dulcinée ait autant de temps disponible que vous, pigiste galérien. Il s’avère que moi, vernis dans mon malheur, j’ai les trois en un. Ma copine est pigiste galérienne – mais trop forte, dans sa galère elle a monté un blog débutant mais du tonnerre : La pigeonne
– et son père qui part souvent en vacances a la bonne idée d’habiter à Cannes. Qui dit mieux ?
 
Les vers micelles du Sunbather
Ici c’est le pied. L’appart s’inscrit dans une somptueuse résidence située dans un quartier répondant au doux nom de "La Californie". Plus pompeux comme nom, y’a pas. En tombant cet après-midi sur cette peinture de David Hockney que voilà, j’ai pensé à la piscine qui languit, bleutée dans le jardin résidentiel, entourée de palmiers priapiques. J’ai pensé : "Elle m’irait comme un gant cette piscine s’il faisait quelques degrés de plus". J’ai pensé aussi à Morrissey, à cette chanson fomidable nommée "The lazy sunbather" qu'il y a sur Vauxhall and I, l’un des albums solo du maître es pop anglaise, car cette peinture pop de 1966 s'appelle elle-même "Sunbather" et qu'il soit "lazy", ça se voit, pas besoin de le dire. Cette toile est actuellement présentée à l’exposition Los Angeles 1955 - 1985, naissance d’une capitale artistique, de même que la toile crépusculaire située plus haut, The back of Hollywood d'Edward Ruscha, 1977. J’ai trouvées ces toiles en feuilletant le magazine des Aéroports de Paris et les ai trouvées belles, intéressantes. D’où mon plaisir de vous en toucher mot - c'est le mot. En lisant la brève qui accompagne le "Bain de soleil", j’apprends que Hockney l’a peinte en arrivant en Californie, adaptant "son esthétique pop aux scènes de la vie californienne les plus typiques". En été, le soleil d’ici jetterait dans la piscine les mêmes reflets vermicelles que matérialise la peinture. Serpentins et confettis. Il rendrait les choses d’ici très futiles, factices, matérialistes. Très art déco et pop 70’s. Mais en cette période tout juste pré-printanière, la météo prête à débat – une fine couche de fond de teint nuageuse voile érotiquement le bleu du ciel – et la vie n’est pas pop 70’s, juste douce, avec des tons nuancés dans les pâles. Il fait 15°C tout au plus et c’est un bonheur de se promener seulement vêtu de deux épaisseurs de fringues. On respire. Les palmiers montent haut dans le ciel, exotiques et sculpturaux comme des calumets de la paix, frôlant de leur feu d'artifice notre cinquième étage où nous jouissons – c’est le mot – d’une vue splendide sur la mer, l’île St Marguerite et l’horizon, pour faire court. Un joli bouquet. J’entends au loin les mouettes qui ricanent et vois les lumières des yachts qui scintillent.

Le temps est cool, ainsi que le paysage, mais on pourrait presque s'en foutre, couper les ponts avec l’extérieur et regarder tout comme une peinture depuis notre appart ultra classe. On peut y courir, chanter, danser, sauter comme Gene Kelly. Le frigo est rempli de bonnes choses et NoosTv offre une vue splendide sur les trésors passés et présents du petit écran avec sa cinquantaine de chaînes. Le top ? NBA+ qui passe du basket 24h sur 24. (Ma copine se console en zappant sur Comédie ! et AB1 qui rediffusent tous deux des épisodes de Friends à la pelle.) Luxe, calme et va-nus-pieds. Je me fais plaisir. Si mes parents savaient ça, ils me feraient la gueule. D’ailleurs, ils savent et me font la gueule. Oh rien de grave, ce n’est que passager. Mais c’est juste que c’est TROP SOUVENT passager. Que cette foutue rengaine a le don de me scier le moral. Cette éternelle incompréhension parents-enfants qui me maintient dans un ersatz de posture adolescente, ce stupide fossé générationnel, carabiné par le lien filial, tout cela me déprime. J'aimerais qu'il en soit autrement. Car je les aime mes parents. Je ne voudrais pas passer à côté de ce qu'ils sont. Bref, oublions ça.

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14 mars 2006 2 14 /03 /mars /2006 02:32
Présente Meds à la Cigale

Dix ans après son concert à la Cigale pour la sortie de Placebo, son premier disque, la bande à Molko réinvestit la salle parisienne pour présenter Meds, cinquième étape discographique de son parcours victorieux. Placé sous l’égide d’un retour aux sources, le show et le nouvel galette montrent un groupe en forme mais en plein trouble identitaire qui s'applique à ressasser, sauf rares exceptions, ses recettes dark-pop-teenage.
 

Le groupe débarque sur scène. La foule est en délire. Eux ont l’air d’en vouloir. Is démarrent sans perte de temps en éperonnant un de ces riff intrépide sombrement exalté dont ils ont le secret. Un de ces riff qui nous connaît comme sa poche et passe nos émotions au peigne fin. Mais le morceau passe comme une lettre à la poste. C'est "Meds", une nouvelle cartouche, qui ouvre le show, comme l’album, sur un arrière-goût d'"Every You Every Me". En terrain archi-connu, caressé dans le sens du poil, le public hurle, ne cache pas sa joie au contact de cette prise en main familière. "Infra-red" enchaîne dans la même veine, véloce, nickel, taillé pour plaire.
 
"Hey ! Dim ?"
Comme le souhaitait Dimitri Tikovoï, qui a produit Meds, le groupe sonne fougueux, soudé et organique dans la lignée de ses débuts. Mais ce qui est vrai sur scène l’est moins sur disque, avec l'habillage sonore du producteur, ce qui la fout un peu mal. L’album semble trop produit au détriment du songwriting. La faute peut-être à trop de matos, à l’influence goth pataude, mais double disque d’or, de son pote Nicolas Sirkis d'Indochine, ou à un à un compromis artistique, qui sait ? Tikovoï voulait
"leur faire refaire leur premier album". Je le sais parce que je lui ai demandé à Dimitri, au téléphone. J’ai dit : "Hey ! Dim (je l'appelle Dim), tu veux leur faire refaire leur premier album ? T'es sérieux ? Mais hum c'est impossible !" Il m'a répondu. Oh ! des broutilles, des esquives, enfin non pas des broutilles, des trucs intéressants, mais ce n'est juste pas le moment d'en parler. On en reparlera plus tard, en long et en large, car je suis resté longtemps scotché au téléphone avec Dim. On en reparlera aussi quand j'aurai reçu le disque en mains propres, disques qui vient de sortir aujourd'hui même, car pour l'instant je ne l'ai écouté que deux fois chez la maison de disques, ce qui est insuffisant pour formuler un jugement valide.
 
Bam ! Bam !
Sur scène les arrangements sont joués dans l’ombre par deux suppléments d'âmes : deux vrais musiciens qui ont synthés et guitares-basses à disposition. (On ne détaillera pas leur état civil, ni leurs CV, ni le numéro de série de leurs instruments. Qui en a sincèrement quelque chose à faire ?) Toujours est-il qu'ils jouent bien. Les morceaux s'enchaînent à vive allure, sans remous, bam ! bam ! Et toujours cette impression désagréable, un peu rasoir, d’écouter un best-of sur sa platine, car tout est épilé, intrinsèquement millimétré au poil près. Toujours cette impression qu’on essaie de juguler, mais rien n’y fait. C’est sans bien ni mal qu’on gobe ces pilules pop-rock. Depuis 10 ans que le groupe nous fournit en tubes, notre corps a développé les récepteurs adéquats pour recevoir leur virulence. Tout se fixe parfaitement.

Home sweet home
Quelque chose nous titille. Une rythmique acide et métallique mâche, macère et remet sur l'établi la mélancolie vengeresse du groupe avec un soupçon d'exotisme dark indus. C'est "Space Monkey" qui décline non sans charme mais sans réelle déception l'approche couplet-refrain héroïque dont le trio a fait sa marque de fabrique. Rien n'émousse l'enchaînement taylorique des pop-songs. A peine le lyrisme – inédit ! – d'un sample de cordes au refrain et hop ! "Drag" nous remet en scelle avec son rock svelte et benco-tonique. Placebo manie son set comme un chef. Chaque nouveauté est contrebalancée d'un classique. Tout se suit, et rentre dans le rang, incisif, serré. Mais voilà qu'au cinquième morceau Brian lâche sa gratte et s’octroie une pause clope. On entend Stefan Oldsal galocher, groggy, quelques notes tranquilles sur sa six cordes qui s'étire, s'étire, carillonnant langoureusement dans une reverb immense. C'est "Follow the cops back home". La balade spleen de Meds. Celle lancinante et crèvecoeur, qui se charge de dilater l'affaire. Chaque album du groupe en compte au moins une, killeuse, à faire pleurer dans les chambrette (on notera qu'à ce jeu-là Garbage est loin d'être manchot). C'est comme une figure imposée, un rendez-vous, une sucrerie. D'ailleurs Brian ne s'en cache pas : son but est encore et toujours de flirter tant que possible avec l'excellence clichée du "With or Without You" de U2 sur The Joshua Tree. Alors, guitare sur le bas-coté, tirant sur sa clope, il la savoure avec nous cette chanson, il la contemple, écoute ses potes taffer l'intro, dérouler lentement les motifs, l'envoûtement, les chevaux qui galopent cheveux dans le vent. Tant de savoir-faire en jette.

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11 mars 2006 6 11 /03 /mars /2006 16:06
Moins fort que Calo ?

11h20, samedi 11 mars. Comme il m’arrive de le faire, j’allume la télé dès mon réveil. Je vois Johnny Halliday encerclé par trois black qui foutent le dawa. C'est quoi ce bin’s ?


Les rappeurs représentent les démons du rocker. La street-crédibility qu’il n’a plus en tant qu’idole vieillissante et friquée. Ils sont aussi son lien vers les jeunes qu’il ne touche plus. Mais ces trois rappeurs n’ont eux-mêmes plus VRAIMENT de démons, de street-cred’ et la côte auprès des jeunes (Aujourd’hui c’est plus Rohff, Diam's, Sinik, Booba). Comme Johnny, ils ont aussi leur âge d’or derrière eux et tout crédit définitivement perdu. Ils le savent, alors tant qu’à faire, ils enfoncent le clou en prêchant pour le grand capital de l’icône Johnny Hallyday. Ici tout le monde est détaché de ses racines, de son passé et n’est plus qu’ombre de ce qu’il fut. Ici, tout n’est que Hit, Machine et Superficialité. On se refait une vie qu’on n’a plus pour duper les jeunes. Mais on s’en fout un peu car ça fait déjà longtemps qu’on n’a plus, rappeurs comme rocker, de portée mythique à gérer, on peut donc faire ce qu’on veut. Enfin presque. Ces quatre-là ne font pas VRAIMENT n’importe quoi. Johnny, le loup, et ses trois petits cochons essaient de casser la baraque car d’autres ont montré que c’était possible avant eux. En s’associant sur "Face à la mer", Passi, l’ex-star du rap, et Calogero, le rocker variète, ont cassé la baraque. Tous deux racontaient leur difficile ascension d’autodidacte dans la musique et la vie. Une vie à jouer des coudes pour réussir. Et en apparence, le rocker profitait encore du rappeur. Passi blablatait et Calo répétait le refrain en boucle. Mais sous le manteau, le rappeur s’en mettait plein les fouilles grâce à la popularité maousse du rocker. C’est sur ce succès que surfe Johnny avec "Le temps passe", mais aussi Noah lorsqu’il chante "Métisse" avec Disiz la Peste. Ce n’est pas le duo Run DMC et Aerosmith qu’ils ont en ligne de mire !

La vérité, c’est qu’avec le temps qui passe et l’argent aussi (time is money), on se détache de nos racines et de ce qu’on a été, de cette période de notre vie où l’on était héroïque et où l’on s’est défini. Sorti des galères et parvenu au sommet, on se retrouve un jour à dire qu’en fait c’était bien avant, parce qu’on avait un combat, un idéal, une cause. Parce qu’on se sentait vivre en participant à quelque chose. Tandis que légende, partout et nulle part à la fois, notre histoire ne nous appartient plus, on ne s’appartient plus, on rame pour survivre à ce qu’on fut. Au beau milieu d’un trop plein de soi médiatique, on est vidé de son vécu. Cette conclusion d’enfer ne va pas m’aider à rentrer dans mon samedi. En même temps, je n’ai pas de souci à me faire. Le temps passe mais ce n’est pas demain que je vais crouler sous l’argent et les fans !

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11 mars 2006 6 11 /03 /mars /2006 16:03
Moins fort que Calo ?

11h20, samedi 11 mars. Comme il m’arrive de le faire, j’allume la télé dès mon réveil. Je vois Johnny Halliday encerclé par trois black qui foutent le dawa. C'est quoi ce bin’s ?


Je n’ai pas bu la veille. Ce que je vois donc sur l’écran n’est pas une hallu, c’est VRAIMENT vrai. VRAIMENT en train de se passer. J’avais beau le savoir, ça fait drôle de voir notre Johnny national chanter avec Passi, Stomy Bugsy et Doc Gynéco. Même si c’est sur le plateau de Charly et Lulu (il n’y a qu’eux pour oser le faire). Les trois rappeurs miment là l’entente rageuse de leurs trois flow mêlés comme au bon vieux temps du Ministère A.M.E.R (AMER pour Action, Musique, Et Rap). Alors qu’on sait bien que les gus n’ont plus d’atomes crochus depuis belle lurette (le Ministère s’est dissous en 96). Mais bon, ils se débrouillent plutôt bien, ils semblent même motivés, sans trop qu’on sache pourquoi. Pour Johnny, c’est moins évident. Il a l’air un peu perdu au milieu de la meute. Pied de micro en main, il se débat à l’étroit avec un refrain qu’il ne sait pas trop comment pousser, entre confidence et rugissement.

Ce qui ne tue pas nous rend plus fort...
Le morceau s’intitule "Le temps passe". C’est le 2e single de son dernier album, Ma vérité, après "Ma religion dans son regard", qui était très orienté "Oh ! Marie" pour faire pleurer dans les chaumières la ménagère. "Le temps passe" est hip hop rock, comme chante Passi, donc plutôt destiné à rafler un public hors captif pour Johnny : les jeunes fan de rap. Apparemment, c’est un morceau autobiographique. Johnny y chante son parcours de self made man qui a finalement triomphé malgré les embûches, et même grâce aux embûches, car elles rendent plus fort. Respect aux embûches. Ma vérité compte d’ailleurs une chanson intitulée "Ce qui ne tue pas nous rend plus fort" (sauf le ridicule ?), chanson (écrite par Guy Carlier) qu’il aurait pu s’adresser à lui-même si le rocker institutionnel qu’il est ne devait pas sans cesse passer de la pommade au public. Bref, Johnny balance sa sauce par intermittence et les rappeurs apportent chacun des liens hypertextes plus crus pour nourrir l’histoire du rocker de vrais morceaux de vécu. Ces bulles de réalité sur le vif, le rocker est censé y être connecté à bloc, se les remémorer comme si elles dataient d’hier, limite la nuit elles lui font encore mal comme un tatouage qu’on vient de se faire faire.

Johnny se prend pour Didier Wampas ?
Une chose nous interpelle : des paroles que rappe le Doc sur Sarko et son slip. On ne comprend pas trop. On cherche le texte sur le Net. On décrypte au passage le discours de Johnny qu’on ne capte pas trop en live parasité et qu’il est par l’intervention des rappeurs : "A l'heure où le monde se bouscule / Je repasse ma vie à l'envers / J'en ai fait des rêves, des calculs / J'ai jamais voulu vraiment me laisser faire / Et le temps passe / non je ne regrette rien / Rien ne s'efface / mon destin me ressemble bien / Et le temps passe / pourtant, je ne regrette rien / La moindre trace / je l'ai bâtie de mes mains / J'ai chanté les Hommes, leurs désirs / les destins fragiles et l'amour / On a voulu que j'tombe sur place / Moi, j'ai souvent fait face / et je combats toujours / ("Ministère", dit Gynéco) Aussi burnés qu'les keufs sous Sarkozy / L'être humain porte en lui le meilleur / Je sens encore le poids de mes erreurs / de mes erreurs / Le pire a si souvent été là / La peine guidait mes pas / mais je la garde au fond de moi." Et surprise : ce que dit Doc Gynéco sur le plateau de Charly et Lulu est gonflé, provoc : "Ministère, aussi burnés qu'les keufs sous Sarkozy". Mais sur le papier, ses propos sont attribués à Johnny, c’est lui qui devrait les tenir, vous imaginez ! Johnny jouant les Didier Wampas et chantant : "Chirac en prison". Ce n’est pas prêt d’arriver. C’est donc le noir qui s’y colle...

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