Celui qui chantait "Should I Stay Or Should I Go" en 81 n'a jamais raccroché sa gibson. Après The Clash, Mick Jones a monté Big Audio Dynamite et à la fin de cette aventure, en 99, il n'a pas attendu bien longtemps avant de se remettre en selle puisque dès 2002 il formait Carbon/Silicon avec Tony James, le bassiste de son premier groupe, London SS. The Last Post est le premier disque à l'ancienne issu de l'association de ces deux tontons flingueurs du rock. Avant, comme des jeunes, ils ont diffusé trois albums studios gratuitement sur le net. Alors, a plus de 50 ans, Mick Jones a-t-il passé l'âge de faire du rock, du vrai, du bon ? L'élément Carbon, car instinctif, de la paire Carbon/Silicon répond autour d'une bière et d'un bol de chips.
"Il y a un côté punk à prendre
du côté d'Internet"
"Ce monde ressemble de plus
en plus à Prison Break"
Bonjour Mick...
Bonjour. Dis-moi c'est bien Nicolas Sarkozy en couverture du magazine que tu tiens-là (un ancien n° de Technikart, Nda) ?
Oui, mais c'est un fake, une satire...
Ça veut dire que tu veux faire une interview satirique avec moi ? Tu es journaliste politique ?
Non. Mais on peut parler de politique si vous voulez.
On peut parler de tout ce que tu veux.
Ok. La question n'est peut-être pas très politique mais que savez-vous de notre président, Nicolas Sarkozy ?
Pas grand-chose à part le couple glamour qu'il forme avec Carla Bruni. Elle, je l'ai récemment vu jouer sur la BBC. C'était marrant de l'entendre chanter avant Metallica. C'était deux mondes totalement différents !
Avez-vous suivi le déroulé des élections américaines ?
Oui, j'ai été tenu en haleine par le duel Obama/McCain. Et j'ai encore plus suivi les primaires démocrates qui étaient passionnantes. Je voulais vraiment entendre les discours d'Obama. Et j'ai eu la chance d'être à Portland quand il y a fait son meeting. Il était là devant 75 000 personnes, on se serait cru à San Francisco dans les années 60 !
Dans l'idée vous auriez acceptez de jouer à un meeting d'Obama ?
Tu veux dire comme Bruce Springsteen ? Il a joué à la dernière convention démocratique et ça ressemblait vraiment à un concert, donc pourquoi pas. En même temps le contexte me mettrait peut-être un peu mal à l'aise parce que finalement, même si je soutiens Obama, ma prestation serait instrumentalisée à des fins politiques, et ça fait bizarre de savoir ça. Donc je ne sais pas.
En parlant d'instrumentalisation, connaissez-vous la pub réalisée par la radio française Oui FM qui montre une photo d'époque des Clash avec cette phrase : "Ecoutez enfin un groupe qu'on ne compare pas aux Clash."
Je l'ai découverte aujourd'hui car je suis passé à cette radio. Elle était affichée en grand au mur et on m'a pris en photo dessous.
Que pensez-vous de son message, comme quoi le rock serait un tantinet bloqué dans le recyclage du passé ?
Je n'y souscris pas vraiment. Moi je vois de nouveaux groupes et de nouveaux styles émerger chaque jour. Après c'est sûr qu'aujourd'hui il est rare que ceux-ci aient le temps de se développer pour installer un vrai univers. Mais à la limite peu importe la durée et l'impact, il faut quand même se lâcher, écrire le truc tel qu'on le vit, avec les tripes, ne pas se préoccuper du succès, des médias, juste faire son truc.
Encore aujourd'hui, vous pensez donc, comme le dit le slogan de cette pub, que "Le rock est là pour changer votre vie" ?
Oui, parce que le rock est une question de croyance et qu'à mon avis le seul problème que le rock a aujourd'hui c'est que les gens n'y croient plus assez. Le rock si tu y crois dur comme fer, ça peut encore être subversif, ça peut être ce que tu veux. Aujourd'hui plus qu'hier grâce à Internet et les nouvelles technologies tout le monde peut s'exprimer librement. Il y a un côté punk à prendre là-dedans. Et cette liberté d'expression est une des dernières choses qu'il nous reste, donc il faut en profiter, il faut y aller, il faut faire rocker ce monde qui ressemble de plus en plus à Prison Break.
A Prison Break ?! Je crains de ne pas vous suivre...
Ce n'est pas grave (en fait il révélera plus tard qu'il faisait allusion au côté cryptié et confus du tatouage du héro de la série, Nda). Tiens, regarde ces chips violettes ! Elles me rappellent les chips de mon enfance. Elles étaient vendues avec un sachet de sel bleu. Goûte une de ces fleurs salées !
Merci. Santé ! Donc pour vous Mick le rock n'a donc rien perdu de son sel subversif ?
Bah subversion c'est un grand mot. C'est-à-dire que ça dépend de ce qu'on entend par là. Aujourd'hui la subversion du rock est ailleurs, elle a changé de camp. Parce qu'à la base la subversion du rock était basée sur le fait que c'était la musique que tes parents détestaient. C'était ça, un truc de gosse pour se rebeller contre ses parents. Or aujourd'hui que voit-on ? Les parents vont aux concerts avec leurs enfants. Maintenant à un concert de rock tu as trois générations. Minimum.
A vos concerts il y a des jeunes ?
Il y en a forcément parce que par exemple à Londres où on a pas mal joué dernièrement à chaque fois on avait programmé 4 jeunes groupes en première partie. Il n'empêche, j'ai bien vu que les jeunes présents aimaient beaucoup notre jeu de guitare et l'esprit qu'on dégage.
C'est tout ce qu'il vous reste j'ai envie de dire. Parce que c'est sûr qu'ils ne vont pas se raccrocher à votre look et votre coupe de cheveux !
Oui, mais de toute façon aujourd'hui l'image ce n'est plus important, ça ne choque plus personne, pas même les parents. Moi quand je vois un groupe de mecs rasés qui s'appelle Fucked Up ou Selfish Cunt, ça ne me choque pas.
Votre premier groupe avec Tony James s'appelait London SS. Vous aviez choisi ce nom pour choquer les parents ?
Oui, un peu. En tous cas, ça ne voulait pas dire qu'on était fasciste. En fait on trouvait surtout ce nom chouette parce qu'il sonnait un peu comme The New York Dolls. Ça nous aurait embêté de porter ce nom si on avait eu du succès, mais ça n'a pas été le cas car le groupe n'a duré qu'un an et on n'a jamais vraiment tourner ni sorti de disques. Aujourd'hui, avec le recul, on se dit que ce nom de groupe était vraiment stupide.