Punch hard grunge

"véhiculer un gros sentiment de déjà-vu, ce n'est pas péjoratif, c'est super"
"la musique qui n'accroche pas, je n'en vois pas l'intérêt"
Votre premier album est bien construit je trouve. Il alterne judicieusement quatre morceaux rentre dedans, glisse une ballade, repart au charbon juste derrière avec 5 morceaux vénères et s'achève sur une ballade. Nicolas : Oui, je voulais entremêler les deux, ne pas faire une face énervée et une face calme. Mais le truc c'est que cet album j'ai eu le temps de le préparer. "Teenage", la chanson la plus vieille, date de 2001.
Robin : ça n'a plus rien à voir avec ce qu'on fait aujourd'hui. Parce qu'on a grandi et que maintenant on compose plus à trois. Or on a tous des influences différentes.
Toi, Robin, quels sont tes groupes favoris ? Robin : Mon groupe préféré de tous les temps en ce moment c'est les Queens Of The Stone Age. Après en tant que batteur je suis sur-fan de Police et j'adore Dave Grohl. De toute façon moi je suis de la génération grunge de Seattle. Ce qui me fait vraiment triper à la batterie ce n'est pas de faire des trucs ultra-compliqués mais de faire des trucs énergiques pour casser mes baguettes ! Le côté défouloir.
Toi, Leslie, quels sont tes groupes favoris ? Leslie : En fait, malgré notre différence d'âge, mes goûts sont asses proches de ceux de Nico.
Nicolas : Oui, on se retrouve un peu sur des trucs punk américains bien kitsch comme il y en a d'aujourd'hui. Mais moi mes influences viennent vraiment du hard US des années 80.
Ça se sent à la présence de quelques brefs solos de guitare sur certains de vos morceaux. Nicolas : Oui, je n'en fais pas partout parce que ça me gonfle. Quand j'avais 16 ans c'était autre chose.
Dans votre disque, on se prend vraiment les années 80 en pleine poire quand surgit un saxo en plein milieu de Lower. En l'entendant je me suis dit : "Ah, les salauds, ils ont osé !" et ça passe, nickel, classieux. Nicolas : C'est un copain jazzeux qui est venu mettre ça. Moi je ne l'aurais jamais fait.
Ça donne un petit côté quart d'heure américain au morceau. Nicolas : Il y a un peu ça, mais ce n'est pas non plus un slow genre "Still Loving You" de Scorpion. En fait quand j'ai enregistré l'album je me suis dit qu'on allait rajouter plein de trucs kitsch qu'on n'écoute plus !
Robin : On a par exemple mis des petites percus trouvées sur des albums de Motörhead !
Aujourd'hui le hard revient pas mal en force. Il est enfin de bon ton de dire qu'on écoute AC/DC, Metallica, Iron Maiden, ce que font des groupes comme Justice, Fancy... Robin : Oui, il y a un gros retour de ces années 80. Je le vois tous les soirs au Klub où je bosse comme ingé-son : les groupes qui rameutent le plus de monde sont ceux qui auraient fait un carton dans ces années-là. Leur musique véhicule un gros sentiment de déjà-vu, mais ce n'est pas péjoratif, c'est super.
Tous les morceaux de votre disque sont super accrocheurs, ce qui m'a, j'avoue, bien bluffé. L'objectif de Talia c'est l'efficacité mélodique ? Nicolas : Oui, tant que je peux. Ça c'est l'influence des groupes de hard, on est toujours sur la même structure : intro, couplet, solo au milieu. Pour l'instant on en est là. Sur le deuxième album ce sera peut-être un peu différent. Mais bon le problème pour moi c'est que la musique qui n'accroche pas je n'en vois pas l'intérêt. Ça veut dire que n'importe quel con peut le faire parce que c'est souvent les trucs les plus simples qui sont le plus compliqué à faire.
Effectivement, votre rock est loin d'être cérébral, au contraire il a quelque chose de régressif... Nicolas : Mouais... c'est sûr qu'on ne fait pas de l'expérimental prise de tête mais je ne suis pas non plus dans le trip
"1, 2, 3, 4, couplet, refrain, couplet, refrain" genre 2 minutes 10 à fond la caisse comme les Ramones. Pareil pour les paroles.
Leslie : Mais allez Nicolas, ce n'est pas grave si tu n'es pas cérébral !
Robin : Oui, moi je suis complètement d'accord ! Franchement, à part quelques groupes comme Primus, la musique cérébrale m'a toujours fait chier.
Le groupe, ça vous prend beaucoup de votre temps ? Nicolas : On a des emplois du temps carrément incompatibles. Robin est régisseur au Klub, moi je bosse dans des studios, Leslie est étudiante en informatique. On a donc du mal à se voir en dehors des répétitions et des concerts, mais ça va venir, surtout avec la tournée qui se profile.
Vous avez des plans pour faire des premières parties de groupes connus ? Nicolas : Non, mais on a rencontré Dave Grohl, on aurait dû lui demander !
Robin : Ah oui, c'était énorme ! Pour la sortie du dernier album des Foo Fighters on a reçu des invitations pour l'écouter en avant première. Ça se passait dans un bar. On était à peine une trentaine, les "Fighters" étaient là au complet et nous on était là comme deux cons parce qu'on devait être les seuls à ne pas être journalistes.
Nicolas : On a croisé le mec de Luke, qui a d'ailleurs carrément snobé Dave Grohl, ça m'a fait halluciner. Ce qui était rigolo c'était de voir Dave Grohl.
Vous avez réussi à lui parler ? Nicolas : Oui, à un moment il m'a attrapé par la manche. J'avais peur qu'il m'en mette une ! Il est balèze. Dave Grohl lui tu sens qu'il est vachement sollicité. Tu lui parles et au bout de 30 secondes l'attachée de presse t'interrompt parce qu'elle a toujours quelque chose à lui dire. J'hallucinais de me dire que j'étais en train de parler avec le batteur de Nirvana. J'essayais de ne pas trop y penser sinon j'étais cuit !
Robin : Le mec est super connu mais il n'a absolument pas le melon, il reste hyper humble, très cool. Moi ce qui m'a rendu fou c'est qu'on a parlé avec lui comme si c'était un pote. Le bassiste la première question qu'il nous a posé c'est :
"Wouah, il y a du rock en France ?" Ce n'était pas péjoratif mais il avait l'impression qu'il n'y avait que dalle. Il ne connaissait aucun groupe français.
Vous leur avez filé un de vos CD ? Robin : Oui, Dave Grohl est reparti à son hôtel avec des CD à nous dans les poches !
Photo par Thomas Laisné