Parlhot cherche à remettre l'art de l'interview au cœur de la critique rock. Parce que chroniquer des CD derrière son ordi, c'est cool, je le fais aussi, mais le faire en face du groupe en se permettant de parler d'autres choses, souvent c'est mieux, non ?
Dans une interview de 87 vous avez déclaré que vous ne feriez plus de musique en 2007, qu'un groupe de rock ne devait faire qu'un album puis se taire. Force est de constater que vous n'avez pas tenu parole !
Oui, j'ai menti. Enfin, je pensais vraiment ça il y a 20 ans. C'était juste stupide de se prononcer comme ça sur un futur aussi lointain.
En 87 vous arriviez après la new wave. En 91 avec Seamonsters, un disque qualifié de très agressif et produit par Steve Albini, on a dit que vous devanciez le grunge. A croire que The Wedding Present a toujours échappé aux grands courant qui ont marqué l'histoire du rock. Vous en aviez conscience ?
Oui. Il y a beaucoup de fan attitude et de suivisme dans le monde de la musique. C'est cool si tu aimes le style de musique en vogue, mais ça peut devenir ennuyeux si tous les groupes se mettent à sonner pareil. Et d'une certaine façon nous on a toujours été en dehors des modes et des tendances. Un peu comme New Order.
A cette différence que New Order a fait école en créant son propre son.
Exactement. Car quand un groupe d'indie pop se met à la dance music alors il ne s'agit plus vraiment de la dance music, mais quelque chose d'autre, d'inclassable et je trouve ça bien. A l'époque de Madchester, avec les Stones Roses, la danse, tout ça, on aurait pu suivre le mouvement mais ça ne m'intéressait pas, je voulais d'autant plus qu'on fasse nos chansons, qu'on suive notre chemin. On ne s'est jamais branché sur ce qui déchaînait les passions. C'est juste notre façon d'être.
The Wedding Present fut pleinement contemporain de ce qu'on a appelé l'indie rock. Quel regard portez-vous sur l'indie rock d'aujourd'hui ?
Aujourd'hui je pense que c'est devenu quelque chose de l'ordre du marketing. Mais à l'époque ça ne l'était pas. Nous, on n'avait pas le choix. On n'intéressait pas vraiment les majors, à peine quelques petits labels, comme Rough Trade par exemple. On a essayé de signer un contrat avec un petit label indé mais on n'a jamais réussi donc on a monté notre propre label. Voilà comment on est devenu indépendant. Et on aimait ça ! Parce qu'on était nos propres patrons. Quand on faisait un disque on n'avait pas un businessman sur le dos pour nous dire quoi faire et ne pas faire. Après, si on a signé sur RCA c'est parce qu'on commençait à être bien connu et qu'on avait besoin d'une plus grosse structure pour nous soutenir. On leur a donc dit : "Ok, on signe, mais vous n'avez pas votre mot à dire sur notre musique. Ça c'est notre travail."
Cette éthique de rockeurs indé purs et durs vous a-t-elle aidé à vous distinguer des autres groupes de l'époque ?
En un sens, oui. Même si je suis sûr que d'autres groupes avaient la même éthique. Ce n'est pas toujours facile de fonctionner ainsi. Ça peut être dur de refuser de signer sur une major. On a parfois envie de céder et de se dire : "Ok, filez-moi l'argent..." Mais j'ai toujours aimé m'impliquer à fond dans toutes les étapes de notre travail, de voir comment faire tel son, comment enregistrer ci et ça. Je suis un peu obsessionnel à ce niveau, j'aime pouvoir tout contrôler ! Mais voilà je ne suis pas en train de dire qu'il y a une bonne et une mauvaise manière d'envisager la musique et d'en faire. Nous, on a juste fait ça de la manière qui nous ressemblait.
Pourquoi avoir choisi de reformer The Wedding Present en 2005 ?
En 1997, j'avais un nouveau groupe, Cinerama, avec qui j'ai fait trois albums. Et quand on a commencé à travailler sur Take Fountain, au départ ça devait être un album de Cinerama. Mais au fur et à mesure qu'on l'écrivait, l'arrangeait et l'enregistrait, il est devenu de plus en plus évident que ça sonnait comme du Wedding Present, même si c'était encore proche de ce qu'on avait fait avec Cinerama. Il y avait encore beaucoup de cordes et d'orchestrations car à l'époque j'étais très intéressé par Ennio Morricone et John Barry, mais il y avait de nouveau pas mal de guitares aussi. Le déclic s'est produit quand on a fait une session pour John Peel. Un ingénieur du son est venu me voir et m'a dit : "Ecoute David, ça ce n'est pas du Cinerama, c'est du Wedding Present." J'en ai discuté avec le guitariste de Cinerama, parce que ça dépendait aussi de lui, et il m'a dit : "Ok, mettons ça sur le compte de Wedding Present." C'était donc facile de réactiver The Wedding Present, car ça s'est fait naturellement, malgré moi.
A propos de nom de groupe, il paraît qu'au tout début de l'aventure vous vous demandiez si The Wedding Present était un bon nom de groupe parce que vous aviez l'impression que ça sonnait comme The Birthday Party et que ça faisait plutôt penser à un nom de livre...
Oui, c'est vrai, c'était un nom bizarre. Mais ça m'amuse aujourd'hui, parce que ça fait 20 ans que ce nom fait sa vie. Maintenant j'entends même des gens qui disent : "Tiens, ça c'est une guitare à la Wedding Present." C'est devenu comme un genre, une marque de fabrique ! C'est étrange mais je ne m'en plains pas !
Alors, qu'en est-il du successeur de Take Fountain qui devrait donc sortir au printemps 2008 ?
Hé bien il n'aura pas de violons parce qu'on a choisi de remettre les guitares en avant. Là j'ai presque fini les chansons. Quand on aura fini cette tournée, c'est-à-dire en janvier, on les enregistrera.
Qu'écoutez-vous en ce moment ? Suivez-vous quelques groupes originaires de Leeds, ville natale de Wedding Present ?
Non parce qu'en ce moment je vis à Los Angeles donc j'écoute des groupes de Los Angeles ! Mais je n'ai rien découvert de précis là-bas même si tout le monde joue plus ou moins et qu'il y a donc pas mal de bonne musique. Ce que j'écoute beaucoup en ce moment c'est des groupes de la scène rock canadienne comme Metric, Broken Social Scene, The Dears, The Stars. Tous ces groupes sont bons. Il y a beaucoup de talent là-bas !
Connaissez-vous Iliketrains ? Ils viennent de Leeds .
Oui je les ai déjà vus en concert, ils sont très bons !.
Une dernière question : avez-vous vu le film Control dont nous parlions tout à l'heure ?
Non, par manque de temps, mais tout le monde me dit qu'il est bien. Une fois j'ai eu l'occasion de le voir mais j'ai loupé le début de la séance et comme je voulais le voir en entier je n'y suis pas allé. Peut-être que je le verrai plus tard en DVD !